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Menneskets fysiske og metafysiske virkelighed

Menneskets fysiske og metafysiske virkelighed skildret via ”fiktive” fotografier som litterære ledemotiver i Rose Mélie Rose af Marie Redonnet, L´Appareil-photo af Jean-Philippe Toussaint og L´Image fantôme af Hervé Guibert


Resumé
I 1980´erne udgav det fornemme franske forlag Minuit tre værker, som alle uafhængigt af hinanden tildeler "fiktive" fotografier, mentale dias nedfældet på skrift, en central rolle i deres fortælling. Specialet belyser denne rolles mangeartede udtryk og divergerende formål, primært ud fra et begreb med rod i den klassiske musik: ledemotivet.

Den tyske komponist Richard Wagner anvendte orkestret som musikalsk formidler af en operas narrative struktur eller tematiske begrebsverden ved at lade tilbagevendende melodifragmenter, ledemotiver, optræde på strategiske tidspunkter i det kronologiske eller dramatiske hændelsesforløb. Specialet godtgør, at de "fiktive" fotografier bruges med lignende kompositionsmæssig snilde til at skabe sammenhæng i en tekst.
Endvidere ligger den danske populærvidenskabsmand Leo Hjortsøs definition på det herodotiske ledemotiv til grund for nærlæsningen af én af teksterne, som tilhører genren selvbiografisk fiktion, og derved lykkes det at detektere mennesket bag forfatteren.

Ledemotivet er i alle teksterne knyttet til fotografiet. Derfor inddrages fototeoretiske tekster af den franske kulturanalytiker Roland Barthes samt af hans nutidige kolleger i diskussionen af ledemotivets funktion. Deres refleksioner og karakteristik af fotografiet som bl.a. den ultimative fetich og et uafviseligt memento mori fører også til en uvurderlig tekstanalytisk forståelse af værkernes opbygning og indhold, som jeg kort vil skitsere i det følgende afsnit.

I Rose Mélie Rose opererer Redonnet med fotografiet som en mnemoteknisk identitetsskaber, der ved sin visuelle dokumentation af hovedpersonens gradvise modning fungerer som et strukturerende ledemotiv. I L´Appareil-photo leger Toussaint med fotografiet som et tematisk ledemotiv, idet hovedpersonen via mødet med fotografiets vidnesbyrd om en svunden og uigenkaldelig fortid når til en spirende erkendelse af menneskets forpligtelse til at udnytte sin frihed ansvarligt. Det herodotiske ledemotiv i Guiberts L´Image fantôme anskueliggør fortællerens opfattelse af fotografiets gode og dårlige sider, som i al væsentlighed stemmer overens med Guiberts egne synspunkter, som disse kommer til udtryk i interviews og selvbiografier. Fotografiet er sjældent et ligegyldigt bekendtskab.

Bedes citeres: S. S. Schunck (2004) Menneskets fysiske og metafysiske virkelighed skildret via "fiktive" fotografier som litterære ledemotiver i Rose Mélie Rose af Marie Redonnet, L´Appareil-photo af Jean-Philippe Toussaint og L´Image fantôme af Hervé Guibert. Specialerapport, Institut for Sprog, Litteratur og Kultur, Aarhus Universitet.

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Resume på fransk

Il n´est d´écrivains ambitieux qui ne recherchent un public qui sachent apprécier l´ampleur de leur travail, et sans doute Marie Redonnet, Jean-Philippe Toussaint et Hervé Guibert ne font-ils point l´exception. Ils ont réussi à faire paraître de nombreux ouvrages aux Éditions de Minuit, mais ce ne sont que des romans-photos étonnants qui feront l´objet de l´analyse de ce devoir: Rose Mélie Rose, L´Appareil-photo et L´Image fantôme. La question est de savoir si l´étude du leitmotiv littéraire permettra de relever ce qui donne ces œ uvres leur force et leur éclat. C´est là le point de départ.
Le leitmotiv est un élément répétitif qui se manifeste dans les textes ci-dessus par l´apparition de photographies qui n´existent qu´en tant que faits d´écriture car les auteurs, la plume à la main, se chargent du développement des clichés. Encore que le leitmotiv revienne à plusieurs reprises dans tous les trois ouvrages en question, il se révèle souple et variable par rapport à la structure et au dénouement des récits pris séparément, si bien qu´il ne remplit jamais la même fonction. Afin de déterminer son rôle caractéristique dans chaque cas particulier, les jugements esthètes portés sur la photographie par Roland Barthes, ardent philosophie de la culture, feront partie de l´analyse des textes dans la mesure où ils éclairont les thèmes singuliers liés à ce genre d´enregistrement chimique ou physique de traces visibles. Pour éclectique qu´il paraisse, ce procédé doit mettre en relief le principe d´unification du leitmotiv. Celui-ci n´est point si alternant que l´on ne puisse le détecter.
Selon Bathes, la valeur d´affirmation de la photographie est incontestable car il souligne qu´une photographie témoigne toujours d´une réalité qui a déjá été. Aussi l´image photographique entraîne-elle le retour de l´objet perdu sous forme hallucinatoire et ce faisant, elle provoque une dissociation spatio-temporelle qui laisse entrevoir la mort au travail. Donc la photographie est un fétiche qui pertube le sens du réel de tout spectateur en se montrant incapable de donner une version continue et causale du monde. L´analyse des trois œuvres établira combien est considérable l´influencde de la photographie redoublée et transformée par le temps qui s´y ajoute.
Si fictionnelle soit-elle, la photographie ne fait qu´inscrire sur sa surface le désir du photographe. Ainsi le personnage principal de Rose Mélie Rose, une jeune fille, fait des photos de tout ce qui lui importe dans son entourage afin de faire de cette reconstruction formelle de son passé un miroir qui lui offrira la représentation tangible de son épanouissement physique et psychique. L´image photographique facilite la restitution des souvenirs et sans ce moyen mnémotechnique, la documentation du développement de son identité féminine fût vite devenue fort difficile. Femme, l´héroïne revendique le droit d´être au monde. Le leitmotiv constitue la structure narrative du récit pour ce qu´il fait ressortir systématiquement les transitions principales de la jeune fille tout en introduisant la question de l´émancipation du sexe faible. De cette manière le leitmotiv assure la correspondance entre la forme et la matière du roman.
Dans L´Appareil-photo Toussaint part du désespoir et va vers la confiance. Il a inséré la photographie dans un curieux récit d´un homme qui se débat contre le désespoir de traîner dans un monde gratuit et hostile qu´il n´ose affronter sauf sourdement dans la coulée de ses pensées. Il est tellement évincé par son indétermination que c´est un « je » anonyme qui parle, mais finalement son vouloir-vivre l´emporte sur le laisser-faire car il est plus courageux que l´on ne pense. La photographie dessille les yeux du personnage sur l´irréversibilité du temps et les possibilités du présent précaire en faisant preuve d´un passé qui ne peut être révoqué. Par là, elle annonce la fin d´une crise existentielle dont il ne fût guère sorti s´il n´eût trouvé un appareil photo abandonné et qu´il s´en fût servi. Le leitmotiv marque le tournant d´une vie pleine de frustration et de malaise, et se leçon de morale harcelera la conscience de quiconque ignore d´être responsable de sa vie.
Hervé Guibert, de même que Redonnet et Toussaint, appartient à la génération postmoderne qui désire réinvestir les formes de la tradition de la saveur de la nouveauté. Il a produit une œuvre fragmentée, L´Image fantôme, qui se distingue par son assemblage d´éléments fictionnel et biographique. Dans ce livre, sa conception de la vie se traduit par l´exploration méthodique de différents types de photographies, et le leitmotiv dévoile donc à quel degré l´auteur adapte la matière de cet ouvrage à ses convictions personnelles. Il semble que ce soit à un haut degré car souvent, de quelque sujet qu´il se fasse une idée, il lui arrive de comparer l´étendue limitée du monde réel avec les visions de son imagination qu´il juge favorablement. Ainsi, dans Mes parents, il admet que son corps infirme saisi par l´empreinte du photographe le dégoûte tant qu´il ne le supporte guère qu´à l´écrit, transformé et dépourvu de toute substance matérielle. De même, dans L´Image fantôme, il ne cesse de condamner la photographie, image neutre du monde extérieur, pour ce qu´elle ne reflète point son monde intérieur d´images subjectives. Prisonnier d´une réalité brute, Guibert a recours à l´écriture. L´Image fantôme en est la preuve.
Le fait d´être exposé, de constituer un objet sous des milliers de regards, est une condition de vie de la société moderne, et la photographie, extension tactile du regard, a renforcé le désir de l´homme de pouvoir à la fois confirmer son identité unique et l´inventer. C´est là l´expérience qu´embrassent Redonnet, Toussaint et Guibert à l´aide du leitmotiv.
Puisque l´étude du leitmotiv a fourni une interprétation cohérente d´un texte contemporain, il s´ensuit que l´analyse d´une œuvre classique pourrait en bénéficier aussi. Quels aspects inconnus ne remonteront à la surface ?